Conférence scientifique du sommet Nutrition for Growth 2025 : vers des solutions globales contre la malnutrition et les MNT
Le 26 mars 2025, dans le cadre du sommet Nutrition for Growth (N4G), une conférence scientifique co-organisée par l’Agence Française de Développement (AFD) et ses partenaires s’est tenue à Paris. La dernière session, proposée par Santé Diabète et la World Diabetes Foundation, et consacrée aux problématiques de malnutrition, d’obésité et de maladies non transmissibles (MNT), a permis d’explorer les liens complexes entre alimentation, santé publique et politiques de régulation.
Un constat alarmant : la double charge de la malnutrition
En introduction, le Dr Malek Batal (Université de Montréal) a rappelé que la plupart des pays à revenu faible et intermédiaire sont confrontés à une double charge de la malnutrition, combinant sous-nutrition et obésité. En cause, un système agroalimentaire maintenu par une majorité de marques contrôlées par quelques multinationales. Parallèlement, le coût d’un régime alimentaire sain ne cesse d’augmenter, touchant toutes les catégories de revenus. Face à ces défis, l’agroécologie apparait comme une solution pour réconcilier production alimentaire durable et santé publique, comme l’illustre une étude en Équateur démontrant les bénéfices des réseaux agroécologiques sur la diversification alimentaire des femmes.
L’expérience du Cameroun : une approche précoce pour éduquer les jeunes
Le Dr Eugene Sobngwi (Ministère de la Santé du Cameroun) a présenté un programme innovant d’éducation nutritionnelle pour les adolescents. Une enquête nationale a révélé que 76 % des élèves consomment des boissons sucrées chaque jour et que 59 % ne prennent pas de petit-déjeuner. Ce programme, soutenu par la World Diabetes Foundation (WDF), a été développé en collaboration avec les ministères de la santé et de l’éducation secondaire. Il inclut du matériel pédagogique en français et en anglais, une application mobile d’information nutritionnelle et une plateforme de formation en ligne pour les vendeurs scolaires. Des actions de plaidoyer sont en cours pour élargir ce programme aux femmes enceintes et aux municipalités.
Le Nutri-Score : un outil de santé publique en constante évolution
La Professeure Mathilde Touvier (Inserm/INRAE) a présenté l’histoire du Nutri-Score, un étiquetage nutritionnel simplifié développé en France en 2017 et adopté par six autres pays européens. Basé sur un algorithme scientifique rigoureux, validé par plus de 150 études, ce système vise à informer les consommateurs et à inciter les industriels à améliorer la qualité nutritionnelle de leurs produits. Toutefois, son adoption obligatoire à l’échelle européenne fait face à des résistances industrielles. Des développements futurs prévoient d’intégrer une indication sur le degré de transformation des aliments et d’étendre son application à la restauration collective et aux produits en vrac.
La taxe sur le sucre au Mexique : un modèle pour réduire la consommation de produits sucrés
Le Dr Simón Barquera (Instituto Nacional de Salud Pública) a détaillé l’impact de la taxe sur les boissons sucrées instaurée au Mexique en 2014. Initialement controversée, cette taxe a entraîné une réduction de 9,7 % des achats de sodas en 2015. Elle a également incité l’industrie à reformuler ses produits, réduisant ainsi la teneur en sucre des boissons. En 2020, des étiquettes d’avertissement nutritionnel ont été introduites pour renforcer la régulation. Des études récentes indiquent une diminution des taux de triglycérides chez les adultes mexicains, illustrant l’efficacité des politiques fiscales en matière de santé publique.
Les politiques nutritionnelles du Japon : un modèle d’éducation et de longévité
Dr. Marika Nomura, du Japon, a souligné que le Japon présente l’espérance de vie la plus longue, avec 81 ans pour les hommes et 87 ans pour les femmes en 2023. Le pays affiche également la plus faible prévalence d’obésité. Concernant les politiques nutritionnelles, il n’y a pas de taxes sur les aliments sucrés ou salés, ni de restrictions sur le marketing ou d’étiquettes d’avertissement. Le gouvernement japonais privilégie une approche axée sur l’intervention individuelle et l’éducation. L’éducation à la nutrition est inscrite dans la loi et mise en œuvre dans tous les contextes, y compris dès la maternelle. Les enfants choisissent eux-mêmes ce qu’ils mangent, avec des menus basés sur les recommandations nationales en matière de nutrition.
Vers une approche systémique des politiques alimentaires et nutritionnelles
Les interventions de cette session ont souligné la nécessité d’adopter une approche globale pour lutter contre la malnutrition et les MNT. Si les initiatives individuelles, comme l’éducation nutritionnelle, sont essentielles, elles doivent s’accompagner de réformes structurelles, telles que la régulation du marché alimentaire, la taxation des produits nocifs et la promotion de systèmes alimentaires durables. Les débats ont mis en évidence l’importance de combiner des actions ciblées et des mesures politiques ambitieuses pour transformer durablement l’environnement alimentaire et améliorer la santé publique à l’échelle mondiale.
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