Interview croisée des photographes de l’exposition « Vivre Avec » : Antoine Martin et John Kalapo
Du 3 au 30 septembre 2025, le Quai Wilson à Genève accueille l’exposition photographique « Vivre Avec ». Réalisée en collaboration avec le NCD Policy Lab, elle donne à voir le quotidien de personnes vivant avec un diabète de type 1 à Genève et à Bamako. À travers leurs portraits et récits, l’exposition invite à découvrir un autre visage de la maladie : celui de l’adaptation, de la résilience et de la solidarité. Rencontre avec les deux photographes du projet, Antoine Martin et John Kalapo.
Que donne à voir l’exposition « Vivre Avec » et quel message souhaitez-vous transmettre au public ?
Antoine Martin : Ce projet montre l’humain derrière le diabète de type 1. Une maladie sans frontières, ni d’âge ni de genre, qui oblige à une vigilance constante… mais qui n’empêche pas de trouver un équilibre. Chaque portrait reflète une manière singulière de continuer à avancer.
John Kalapo : Oui, et j’ajouterais que vivre avec le diabète de type 1 est un défi quotidien, mais pas une fin en soi. Derrière chaque traitement, il y a des personnes dignes, courageuses et résilientes, qui mènent une vie pleine malgré les obstacles.
Le photographe malien John Kalapo retient de sa participation au projet que « vivre avec le diabète de type 1 est un défi quotidien, mais pas une fin en soi ».
En quoi la photographie aide-t-elle à mieux comprendre cette réalité ?
Antoine Martin : Pour moi, c’est un prétexte pour rencontrer et comprendre le quotidien des patients, au-delà du regard médical. La photo plonge dans leurs vies, leurs contraintes, mais aussi leurs adaptations.
John Kalapo : Et elle rend visible ce qui reste souvent invisible. À travers des portraits, on découvre des histoires, des espoirs, une résilience. La photographie devient alors un outil de témoignage et de plaidoyer.
Comment les patients ont-ils été associés à la démarche artistique ?
Antoine Martin : Ils sont au cœur du projet. Leur générosité à partager leur quotidien m’a permis de saisir leur courage et leur soif de vivre. Sans eux, rien n’aurait été possible.
John Kalapo : Avant chaque photo, il y avait un temps d’échange. Les images se sont construites avec eux, pas seulement sur eux. C’était essentiel pour donner une représentation juste.
Avant chaque photo, il y avait un temps d’échange. Les images se sont construites avec eux, pas seulement sur eux.
Qu’est-ce qui a guidé vos choix esthétiques et narratifs ?
Antoine Martin : J’ai travaillé de façon instinctive, puis longuement réfléchi au séquençage : comment rendre hommage tout en informant, comment offrir un témoignage fort d’humanité et de solidarité.
John Kalapo : De mon côté, j’ai cherché la justesse et la sensibilité. Pas de mise en scène dramatique : une lumière naturelle, une proximité douce, des scènes de vie à l’école, au travail, à la maison. Montrer que la maladie fait partie de leur vie, mais ne les résume pas.
« Chaque portrait reflète une manière singulière de continuer à avancer » explique Antoine Martin, un des deux photographes de l’exposition « Vivre Avec ».
Comment avez-vous croisé vos regards dans ce projet ?
Antoine Martin : On a choisi de ne pas échanger nos images pendant la prise de vue, pour garder nos approches intactes. Puis, plus tard, on a confronté nos visions et trouvé ce qui nous rapprochait.
John Kalapo : Oui, nos styles diffèrent, plus journalistique pour Antoine, plus social et contextuel pour moi, mais ensemble, ils se complètent. Ce dialogue a enrichi la narration et donné toute leur place aux personnes photographiées.
Quel rôle espérez-vous que l’exposition joue dans la sensibilisation au diabète ?
Antoine Martin : Briser le tabou. Le diabète de type 1 reste méconnu, parfois entouré de silence. Ici comme ailleurs, il s’agit de partager des expériences pour mieux comprendre et accepter les différences.
John Kalapo : Et de déconstruire les préjugés. Ces visages et ces histoires créent une connexion émotionnelle avec le public. À Bamako comme à Genève, j’espère que cela suscitera dialogue, soutien et action.
Vous avez photographié à Genève et à Bamako : quelles différences et similitudes avez-vous observées ?
Antoine Martin : Les contextes sont différents, mais l’adaptation permanente et la force de vie sont universelles.
John Kalapo : Exactement. À Genève, les soins sont accessibles ; à Bamako, les ressources manquent. Mais partout, la résilience et la solidarité demeurent. Cela montre l’urgence de l’équité en santé.
Qu’est-ce que ce projet vous a appris, personnellement ?
Antoine Martin : Tout. Je ne connaissais rien au diabète en arrivant. Ce travail m’a ouvert les yeux sur la résilience des patients, et même sur ma propre vie.
John Kalapo : Pour moi aussi, ce fut une leçon de force, de courage et d’humanité. Il m’a rappelé combien l’accès aux soins, le soutien familial et communautaire sont essentiels.
« Vivre Avec », du 3 au 30 septembre 2025 sur le Quai Wilson, à Genève. Accès libre. Visite en ligne : https://ncdpolicylab.org/activities/exhibition/living-with
Cette exposition s’inscrit dans une collaboration de longue date entre l’Université de Genève, les Hôpitaux Universitaires de Genève, l’ONG Santé Diabète et différents partenaires au Mali, en lien avec le NCD Policy Lab et avec le soutien de la Direction du Développement et de la Coopération Suisse.